Le Grand collisionneur de hadrons (LHC) a entrepris un vaste programme de consolidation en mars 2013 qui durera jusqu’en 2015. Tout ceux et celles au CERN rattaché-e-s aux accélérateurs et aux expériences travaillent d’arrache pied pour tout compléter à temps.
Les collaborations expérimentales déploient des efforts considérables sur plusieurs fronts. En particulier, il leur faudra faire face au volume accru de données que le LHC apportera en 2015.
Le LHC repartira à une énergie et une luminosité plus élevées, c’est-à-dire avec des faisceaux plus intenses. Pour l’expérience LHCb, qui fonctionne à luminosité constante, plus d’énergie se traduira par plus de particules créées dans chaque événement et à un taux presque deux fois plus élevé.
Même situation pour les autres expériences, ALICE, CMS et ATLAS, avec en plus une luminosité plus élevée, ce qui signifiera plus de collisions se produisant simultanément à chaque fois que des paquets de protons entreront en collision dans le LHC ce qui rendra chaque événement enregistré de plus en plus difficile à décortiquer.
Pour vous donner une idée, voici trois clichés d’évènements captés par le détecteur ATLAS au cours des trois dernières années. L’événement de gauche s’est produit à basse luminosité peu de temps après le démarrage du LHC. Très peu de collisions se sont produites en même temps et on retrouve donc peu de traces dans cet événement.
Puis, en 2011, le nombre moyen de collisions simultanées est passé à environ 12 par événement (au centre) et a atteint 40 à la fin de 2012 (à droite). En 2015, il y aura en moyenne entre 60 et 80 collisions superposées pour chaque évènement dépendamment du mode d’opération qui sera retenu. Le défi sera d’extraire de ce fouillis de traces la collision d’intérêt dans chaque événement.
Par conséquent, beaucoup d’efforts sont consacrés à l’amélioration de la simulation, la calibration et la reconstruction de ces événements. Les physicien-ne-s améliorent les techniques existantes pour pouvoir faire face au volume de données attendu.
L’image ci-dessus montre une vue agrandie d’un événement au centre du détecteur CMS où l’on peut voir les 78 collisions proton-proton qui se sont produites simultanément (les points brillants sur l’axe horizontal). L’échelle ici est de quelques centimètres.
Ici, chaque ligne reconstitue la trace d’une particule chargée. Et chacune de ces traces doit être associée à un seul point d’origine, à savoir le point de l’espace où elle a été créée dans une collision de protons. De cette façon, seules les traces appartenant à la collision principale seront retenues pour reconstituer l’évènement.
Sur l’image ci-dessus, la plupart des traces viennent de collisions où les protons se sont à peine effleurer et peuvent être ignorées. Seules les collisions énergétiques ont une chance de produire les particules lourdes et inusitées qui nous intéressent.
En même temps, tous les groupes profitent de cet arrêt pour remplacer ou réparer les modules électroniques, blocs d’alimentation et autres composantes qui ont fait défaut ou ont montré des signes de détérioration au cours des trois dernières années. De nouveaux sous-détecteurs sont même installés pour améliorer la performance des détecteurs. Par exemple, la collaboration CMS étend sa couverture du détecteur de muons et ATLAS rajoute une quatrième couche au détecteur à pixels. LHCb remplace son tube à faisceaux et ALICE améliore ses calorimètres.
Mais l’effort principal pour toutes les expériences du LHC reste encore la complétions des analyses basées sur l’ensemble des données recueillies jusqu’ici. Tout le monde semble suivre les conseils préférés de ma mère: Cent fois sur le métier, remettez votre ouvrage. C’est précisément ce qui se passe en ce moment. Chaque aspect de l’analyse des données est revisité pour tirer le maximum de l’ensemble des données actuelles: la calibration, l’identification des particules, l’évaluation du bruit de fond et l’extraction du signal.
Toutes les collaborations ont déjà des dizaines de nouveaux résultats fin prêts pour les prochaines grandes conférences estivales telle que celle de la Société européenne de physique à la mi-juillet.
Pauline Gagnon
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